Variation biographique
Comme l’indiquait Le Roy dans la préface, Gauguin – Loin de la route est plus une « variation » qu’une réelle biographie. Si vous voulez tout savoir sur le peintre, mieux vaut lire d’autres ouvrages. Toutefois, le support choisi par les auteurs permet de voir la vie de l’artiste d’un autre angle. Après tout, la bande dessinée n’est-elle pas le média tout indiqué pour nous parler d’un peintre?
Disons-le sans tarder, du point de vue visuel, cet album est un vrai chef-d’œuvre. Dès la première case, avant même d’avoir lu la première bulle, j’ai été charmé par ce style graphique qui, avec ses traits gras, mais toujours poétiques, s’inspire sans aucun doute du style particulier de Gauguin.
Par ailleurs, beaucoup de cases sans texte nous permettent d’apprécier ces superbes dessins que l’on pourrait sans problème retrouver dans un vernissage. Ici, le dessin est clairement plus important que l’écrit.
Malgré cela, le scénario est habilement construit. Nous revivons les dernières années de Gauguin par l’entremise de Victor Segalen, médecin de marine. Celui-ci débarque à Hiva Oa, en août 1903, peu de temps après la mort du peintre (il a rendu l’âme le 8 mai 1903). Il cherche à en apprendre plus sur l’homme. Pour ce faire, il va interroger ceux et celles qui l’ont accompagné jusqu’à son dernier souffle. Il va rapidement contacter Ky Dong, un homme chassé de l’Indochine par le gouvernement français pour avoir milité pour son départ. Cet homme a été l’un de ses plus fidèles collaborateurs et va aider Victor dans ses recherches.
Le récit est entrecoupé de retours en arrière nous présentant Gauguin à son arrivée aux îles Marquises dans le but de se construire une maison et de s’adonner à son art. Rapidement, il va se lier d’amitié avec les « indigènes » (c’est comme ça qu’on les appelle à l’époque) et même à prendre régulièrement leur défense.
L’histoire contient, à ce propos, plusieurs citations provenant des écrits de l’artiste sur, par exemple, la condition de la femme, sur Dieu et ses représentants ou l’État. On va se rendre compte qu’il est très en avance sur son époque.
Les retours en arrière s’intègrent bien au récit. Même s’il y en a un nombre important, jamais on ne devient mélangé. On fait vite la différence entre les deux histoires.
À la fin de l’ouvrage, les auteurs ont pensé insérer les photos des principaux protagonistes de l’histoire. En plus de nous faire prendre conscience que ces personnes ont réellement existé, cet ajout nous permet de voir ce qui a inspiré le dessinateur et de faire les comparaisons qui s’imposent.
Verdict
Au final, Gauguin – Loin de la route nous offre un portrait unique des dernières années de ce grand peintre. Ce n’était pas une mince affaire, mais les auteurs y sont parvenus avec brio. Il signe là un ouvrage cohérent, mais également un véritable chef-d’œuvre visuel qui nous donne envie de (re)plonger dans l’œuvre de Gauguin, un grand parmi les grands.
Cote : 5 étoiles sur 5
Gauguin – Loin de la route
Maximilien Le Roy et Christophe Gaultier