Un don mortel
L’histoire est à la fois simple et complexe. On y suit David Smith, un jeune sculpteur vivant à New York et qui a été, il y a de cela quelques années, très célèbre, à cause d’un riche mécène. Après s’être chicané avec ce dernier, il a de la difficulté à remonter la pente. Il n’a pas d’inspiration et personne ne veut afficher ses oeuvres dans une galerie et encore moins les acheter.
Puis, un jour, il rencontre une personne spéciale qui lui offre quelque chose d’unique : pouvoir créer ce qu’il veut avec ses mains… en échange de son âme. En effet, une fois qu’il aura ce « don », il ne lui restera plus que 200 jours à vivre. Désespéré, il finit par accepter.
Sauf que quelques jours plus tard, il fait la connaissance de Meg, une jeune artiste dont il tombe éperdument amoureux. Son grand amour va venir profondément ébranler ses certitudes. Le seul problème, c’est qu’il ne peut pas retourner en arrière. Le compte à rebours ne s’arrêtera jamais…
Entre ombre et lumière
Le Sculpteur est une histoire sur la vie, la mort (son acceptation difficile, voire impossible) et, bien sûr, sur l’amour. Mais le plus beau dans cet album, c’est que Scott McCloud aborde ces thèmes les plus profonds de la vie (et aussi les plus populaires de la littérature) avec simplicité, voire presque avec légèreté.
Je ne dis pas que l’album manque de profondeur. Bien au contraire. Je dis juste que sa lecture est d’une fluidité incroyable, si bien qu’on traverse tous ces thèmes complexes sans vraiment s’en rendre compte. C’est comme s’ils entraient en quelque sorte en nous.
L’ouvrage est l’une des meilleures histoires d’amour que j’ai lues, mais aussi l’une des plus tristes. Elle rejoint, du point de vue de l’intensité, les opéras de Bellini, Donizetti, Verdi et Puccini. Sans vous gâcher la surprise, vous comprendrez que la finale est d’une extrême tristesse et n’a rien à envier aux opéras de ces compositeurs.
Toutefois, l’auteur ne manque jamais de nous montrer la lumière au bout du tunnel. Le récit se déroule dans le jeune milieu artistique new-yorkais et c’est un réel plaisir de le découvrir par les yeux de son auteur et, par ricochet, de son personnage principal.
Un dessin tout en douceur
Malgré le travail d’écriture colossal, le bédéiste n’a pas mis le dessin de côté. Les illustrations« bleutées » adoucissent souvent le propos et entourent l’oeuvre d’une aura presque surnaturelle. C’est comme si l’histoire nous était racontée par la mort elle-même.
On prend d’ailleurs un grand plaisir à découvrir la ville de New York. Les scènes de foules sont peu nombreuses, c’est vrai, mais chacune d’entre elles présente un souci du détail impressionnant. Et que dire des décors de la grosse pomme dont plusieurs rappellent une carte postale ?
En introduction, j’ai dit que l’oeuvre faisait pas moins de 500 pages. C’est exact. Mais étonnamment, à aucun moment je n’ai senti qu’il y avait des longueurs, des temps morts ou des scènes inutiles. Les 500 pages forment un tout et je n’en enlèverais aucune.
Verdict
Le Sculpteur est l’une des bandes dessinées les plus abouties que j’ai lues ces dernières années. Elle ne laissera personne indifférent. Juste à y repenser, j’en ai des frissons. Un album universel qui, je l’espère, traversera le temps. À lire et à relire!
Le Sculpteur
Rue de Sèvres
Cote : 5 étoiles sur 5