La tension est à son comble depuis quelques semaines entre la Corée du Nord et la Corée du Sud; on se croirait dans un mauvais film sur la Guerre froide des années 60-70! En effet, ce nouveau joueur dans la ligue des puissances nucléaires inquiète lorsqu’on voit l’attitude du chef de la Corée du Sud. Le président (ou plutôt dictateur) de la Corée du Nord, Kim Jung-Un, dans sa folie des grandeurs, a décidé de menacer rien de moins que les États-Unis eux-mêmes en laissant présager une frappe nucléaire préventive en réponse à l’exercice militaire conjoint (É.-U.-Corée du Sud) qui se déroule près de la frontière entre les deux Corées. Je ne sais pas pour vous, mais ça me rappelle un peu cette peur d’un holocauste atomique qui nous venait à l’époque de l’URSS et du Pacte de Varsovie. Il fut un temps pas si lointain où le Canada était aussi un pays utilisateur d’armes nucléaires. Bien peu de gens au pays le savent. Parcourons cet invraisemblable pan de notre histoire militaire.
La cours à la bombe atomique
La Seconde Guerre mondiale a prit fin abruptement grâce à une puissante arme développée secrètement que l’on a appelée la bombe atomique. Les Alliés ont participé à différents niveaux, mais le Canada y a eu une part des plus importantes, fournissant chercheurs, installations et surtout, uranium. À la fin de la guerre, le Canada se positionnait comme une puissance économique et même militaire. Mais le Canada décida qu’il n’était pas dans son intérêt de se munir d’armes nucléaires (qu’il avait les moyens et la technologie de produire). Le pays voulait investir dans ses programmes sociaux plutôt que dans l’armement.
Toutefois, le gouvernement canadien autorisa les Américains à déployer sur son territoire des bombardiers et des bombes atomiques. La base militaire de Goose Bay au Labrador reçut onze bombes à ogives nucléaires, car cette base se trouve près de l’Europe. C’est de cette base que provenait le B-50 de l’USAF qui largua dans le fleuve Saint-Laurent, en face de Saint-André-de-Kamouraska le 10 novembre 1950, une bombe nucléaire Mk4 en raison d’une panne de moteur. Cette situation de « Broken Arrow » (où on perd littéralement un engin nucléaire) n’eut pas de suite catastrophique.
La politique nucléaire du Canada
À la fin des années 50, conséquence de pressions des É.-U. et de nos alliés de l’OTAN (Organisation du traité de l’Atlantique Nord), le Canada fit volte-face et se dota d’armes nucléaires. Afin de se défendre contre une attaque aérienne d’une flotte de bombardiers soviétiques, 56 missiles sol-air CIM-10 Bomarc à têtes nucléaires furent installés sur deux sites au Canada : un à North Bay en Ontario et un autre à La Macaza dans les Laurentides, au Québec. Ensuite, toujours pour intercepter des ennemis bien plus nombreux, des missiles air-air AIR-2 Genie équipèrent les appareils CF-101 Voodoo, notamment à Bagotville. L’acquisition des missiles Bomarc et des appareils Voodoo se firent sur le dos des CF-105 Arrow dont le gouvernement conservateur de l’époque ordonna l’annulation du projet, probablement pour plaire à nos alliés américains.
Pour compléter l’arsenal nucléaire canadien, mentionnons l’acquisition de quatre systèmes de lancement de missiles sol-sol tactiques Honest John (quatre missiles chacun), déployés en Allemagne de l’Ouest, puis d’entre 90 à 120 bombes à gravité montées sur une centaine de chasseurs-bombardiers CF-104.
Cet arsenal nucléaire déployé par le Canada avait ceci de particulier : les têtes nucléaires ne furent jamais la propriété du Canada! L’entreposage et l’entretien de celles-ci relevaient d’équipages américains. Au besoin, des militaires américains servant sur les bases canadiennes devaient installer les armes sur nos appareils. Drôle de situation, avouons-le!
Une question d’image
Finalement, c’est le futur premier ministre Pierre Elliott Trudeau, dès les années 60, qui amena le Canada à renoncer définitivement à l’armement nucléaire en prétextant, non sans raison je crois, qu’il est préférable de prôner le désarment et la détente si on veut vraiment la paix. Le Canada avait une image de pays armé pour la paix avec ses casques bleus et l’arme nucléaire représentait une flagrante contradiction à son dossier. Les dernières armes nucléaires, les missiles Genie des intercepteurs CF-101, furent retirées du service en 1984 lors de l’arrivée des nouveaux chasseurs CF-18. Depuis ce temps, les choses ont bien changé et la Guerre froide a pris fin; on joue même au hockey avec les Russes! Mais tout n’est pas réglé, comme on peut le constater en voyant toute la volonté déployée par l’Iran et la Corée du Nord pour acquérir la technologie de la bombe atomique.
Liens :
http://grandquebec.com/histoire/bombe-atomique/
http://www.journal.forces.gc.ca/vol10/no1/08-trudgen-fra.asp
http://fr.wikipedia.org/wiki/Arme_nucl%C3%A9aire