Accumuler sans réaliser
Je vous le disais dans un précédent article, les jeux à rabais représentent un excellent moyen d’exploiter une faiblesse chez l’être humain. Or, un récent sondage mené par Kotaku démontre que les joueurs accumulent des jeux en profitant des généreux rabais proposés, notamment sur Steam. En effet, selon le sondage mené auprès de 1 400 personnes, 79 % ont ressenti une satisfaction pour avoir profité d’un rabais, ce qui est appuyé par une autre statistique mentionnant que le joueur moyen achète seulement 20 % de ses jeux à plein prix. Ce même joueur s’est procuré de 11 à 25 jeux sans avoir touché à 40 % d’entre eux. Pire, 30 % des joueurs ont plus de 50 jeux non utilisés dans leurs piles!
Grosso modo, on achète à rabais et on a l’illusion d’être réjouis parce qu’on a payé moins cher que si on s’était procurés un titre à plein prix. J’affirme qu’il s’agit d’une illusion parce que la réjouissance n’en est pas vraiment une. Si on achète une pièce de viande à 33 % de rabais, on peut être satisfait parce que nous la consommerons le soir même ou éventuellement. Cependant, dans le cas de jeux à rabais, bien souvent, on ne fait que profiter des rabais pour mettre ces titres dans notre pile afin d’y jouer éventuellement, voire jamais.
Le pire est qu’on accumule sans s’en rendre compte, phénomène accentué par les bibliothèques virtuelles. Sur Steam, il est facile de stocker des dizaines et des dizaines de jeux qu’on a, évidemment, payés à rabais sans avoir conscience qu’on stocke encore et toujours plus de titres. Lorsqu’on achète des jeux physiques, à un certain moment, on prend conscience que cela n’a plus de bon sens lorsqu’on voit les boîtes s’empiler. Mais virtuellement, ça ne frappe pas autant parce qu’on ne voit pas le stock s’accumuler devant nos yeux. Du coup, on achète encore plus sans toujours avoir conscience de ce qui est dans notre backlog.
Les excuses pour acheter
Pourquoi diable achète-t-on sans consommer? C’est une bonne question. Bien souvent, on va se dire que c’est pour plus tard, lors de journées où on n’aura rien à faire ou encore lors de périodes où il n’y aura pas beaucoup de nouvelles sorties. On se dit aussi qu’il y aura des périodes plus creuses au plan financier où, justement, on pourra aller piger dans cette pile. Malheureusement, ces fameuses périodes n’arrivent que très rarement. Et si elles surviennent, l’espace de temps aura généralement été assez long pour rendre ces jeux moins intéressants, que ce soit au plan visuel ou de la jouabilité. Quant à la possibilité de n’avoir plus à rien à jouer un jour, on préfère ne pas y penser tellement cette perspective est épeurante!
Il faut dire qu’un jeu, ce n’est pas un livre, un film ou un aliment. Pour en profiter, il faut investir beaucoup plus de temps qu’autre chose. Prenez Grand Theft Auto V. Pour en faire le tour au complet, vous devrez y jouer quoi, 40, 60, 80 heures, peut-être même 100? Ou bien Skyrim, qui ne peut théoriquement jamais se terminer avec ses quêtes se régénérant. Nous avons tous une vie et, donc, on ne peut seulement jouer pendant toutes ces heures. On divise le temps de jeu pour un seul titre sur plusieurs jours, semaines, voire mois. Et que fait-on entre ces périodes de jeu? On continue à regarder les spéciaux, on achète et on accumule en se disant qu’une fois notre jeu fini, on aura le temps de jouer à ce qu’on vient d’acheter, cela demeurant évidemment très hypothétique puisque le temps finit généralement par nous manquer.
N’ayez pas honte, mais soyez réalistes
Doit-on avoir honte d’accumuler autant? Non, puisque c’est pratiquement normal, surtout avec les techniques de ventes modernes des compagnies. Cependant, il est bon de faire un inventaire de ses jeux de même qu’un bilan réaliste de notre temps de jeu. Je comprends tout à fait qu’acheter un jeu à succès et que tout le monde vante soit alléchant, voire insoutenable, mais demandez-vous si vous aurez le temps d’en profiter ou bien s’il ira tout simplement se rajouter dans votre pile. Regardez aussi ce que vous avez accumulé et demandez-vous si cela vaut la peine que vous dépensiez pour en rajouter.
Ce n’est pas facile de résister à la tentation, mais en l’opposant à nos avoirs de même qu’à notre emploi du temps, elle peut être plus facilement contrée!