Une prémisse pour le moins originale
À la base, 100 Bullets met en scène un drôle de personnage. L’énigmatique agent Graves offre la possibilité aux gens de se venger du mal qui leur a été fait, et ce, sans devoir craindre les conséquences. Chaque personne contactée se voit remettre une mallette dans laquelle on retrouve une arme banalisée avec 100 balles impossibles à retracer. Elle peut donc commettre un meurtre sans avoir peur que la police lui mette le grappin dessus.
Les personnes choisies peuvent accepter ou refuser de passer à l’acte. Cependant, ça ne change rien si elles acceptent ou non de commettre un meurtre. Elles ne sont pas punies ni récompensées.
À mesure que l’on va progresser dans l’intrigue, l’histoire va s’étoffer. Le Trust, un groupe secret qui contrôlerait presque tout dans le monde, ainsi que leurs soldats privés, les dangereux Minutemen, vont entrer en scène.
Pas pour les enfants
L’œuvre d'Azzarello et Risso s’adresse clairement à un public averti. Il y a des bagarres, du sang, du sexe et de la nudité. Il serait en revanche injustifié de lever le nez sur cette série à cause de cet aspect. 100 Bullets ne fait certes pas dans la dentelle, mais offre également un brillant scénario. Ce n'est pas juste une succession incongrue de fusillades.
En effet, l’histoire de cette série repose sur beaucoup de personnages aux caractères très différents. Au fil des tomes, l’histoire principale se ramifie en de nombreux récits annexes. Pendant un chapitre d’une vingtaine de pages, on peut se balader entre deux, trois ou quatre histoires différentes.
Évidemment, c’est le genre de série qu’il vaut mieux commencer au premier tome. Il est vrai que l’on peut retrouver dans les albums des arbres généalogiques nous expliquant les relations entre les différents personnages, mais si on ne commence pas par la base, on peut vite être mélangé.
Plusieurs sujets traités dans 100 Bullets sont assez difficiles. Dans le 14e tome, Dernières cartouches, on suit entre autres l’histoire de Pip, un jeune enfant noir, dont la mère est droguée. Il vit dans la pauvreté et, dans l’espoir d’en sortir, se fait confier une mission par un gangster : assassiner quelqu'un. Sa mission tourne mal et il se trompe de cible. Alors qu’il croit que son ami le plus cher va l’aider à se sauver de ce pétrin, celui-ci préfère le trahir.
100 Bullets est aussi rempli d’humour noir. Dans plusieurs scènes, la frontière entre dégoût et humour est très mince. Un exemple parmi tant d’autres : dans Dernières cartouches, Remi, l’un des principaux protagonistes, discute avec sa mère au téléphone, alors qu’il se trouve nu. À côté de lui, on peut apercevoir une femme, nue également. Sa mère est en train de lui raconter qu’elle s’est acheté un chiot, pendant que lui s’amuse avec un condom plein de sperme qu'il va finir par lancer contre le mur.
Cette série suit également la mode de faire mourir ses personnages importants. Dans le dernier tome, attendez-vous à voir mourir pas mal de vos protagonistes favoris. Mais c’est également là un autre élément qui me plaît dans ce comics : son imprévisibilité. On peut s’attacher à un personnage et paf, la page d’après, il se fait assassiner. D'ailleurs, si vous avez déjà commencé la série, sachez que vous ne serez pas déçu par les deux derniers tomes. Ils bouclent bien la boucle.
Le style graphique a, bien sûr, évolué en 10 ans. En revanche, une attention particulière a toujours été apportée aux détails des visages et surtout à leur expression (spécialement quand les protagonistes souffrent). Pour moi, le dessinateur a atteint le sommet de son art dans Le grand finale.
En conclusion
Bref, 100 Bullets fait partie des œuvres les plus crues du monde de la bande dessinée. Chaque nouveau chapitre nous surprend et nous fait sortir de notre zone de confort. Mais c’est aussi là sa plus grande force. Ça fait du bien, de temps en temps, d’être secoué!
J’espère en tout cas que mon billet vous aura donné envie de vous procurer cette superbe série. Sachez qu’elle est disponible chez Urban Comics, dans la merveilleuse collection Vertigo Classiques.