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Il y a quelques jours, je suis allé voir le spectacle de deux jeunes humoristes que j’aime bien. L’un d’eux, à un certain moment, s’adresse à son public et demande : « Est-ce qu'il y a des gens de plus de 55 ans dans la salle »?
Quelqu’un au fond de la salle se manifeste et l’humoriste de lui répondre (à la blague) : « Qu’est-ce tu fais là ? Décalice » !
Ce à quoi le public s’esclaffa. Un crowd work efficace, quoique très peu original.
S’en suit d’un entracte durant lequel une dame assise derrière moi s’obstine avec son mari, car elle trouve cette blague inacceptable et blessante. Le mari en question, lui, s’en contre-torche.
À sa place, je lui aurais probablement répondu « si tu trouves qu’un décalice lancé à la blague c’est blessant, je ne sais pas comment tu fais pour survivre dans ce bas monde. Écoute jamais les nouvelles, t’es pas équipé pour ça » !
Mais lui il essaie de calmer le jeu avec des phrases comme « voyons chérie, c’est des blagues, tout le monde a rit » ou encore « c’est arrangé c’t’affaire là, l’humoriste et le monsieur se sont parlé avant le show » ! C’est faux, mais bravo pour l’effort.
La femme ne veut rien savoir. Elle est assise dans le théâtre, Coors Light à la main, et part en guerre contre la colonie artistique au grand complet.
Moi j’écoute et, pour une fois, je passe un bel entracte. Parce que pour un théâtre, un entracte c’est l’occasion de vendre de la bière cheap pis des p’tits sacs de peanuts… mais pour moi, c’est un moment long et pénible qui scrap le show. Pas cette fois.
Ce soir-là, l’entracte à lui seul vaut le prix du billet (et les 75 $ de frais de service) ! Donc je les écoute et là, la conversation prend une tournure que je voyais venir comme les questions d’une journaliste de Radio-Canada à un Québécois qui chante en anglais (« pourquoi vous ne chantez pas en français »… du génie).
La madame se met à parler de Mike Ward (et c’est pas joli). Mettons que ça commençait pas par « ah lui je l’aime assez là, c’est mon meilleur » !
Ironiquement, elle reproche à Ward d’être trop trash dans une diarrhée verbale d’une violence sans nom. Elle commence à l’invectiver et à descendre son spectacle (qu’elle n’a vraisemblablement pas vu). Elle le décrit comme un spectacle dans lequel il menace de tuer des gens pendant 1 heure 30 !
« Ça ne se fait pas souhaiter la mort de quelqu’un », dit-elle en invitant l’humoriste à se crisser devant un train.
Et juste de la façon qu’elle colporte tout ça, je sais que dans une partie de téléphone arabe, c’est elle qui fait toute chier la patente ! Avec elle, la phrase « le saumon fumé de mon mari vaut le détour » devient « Marie aime ça se filmer quand elle fourre » !
Misère…
Michel Grenier, le gérant de Ward (et de surcroît un homme pour qui j’ai beaucoup de respect), dit souvent que…
« Celui qui critique sans connaître est un imbécile sans le savoir ».
Ce soir-là, cette phrase d’une infinie sagesse a pris tout son sens. Je sais dans quel camp la dame est…
Ça me surprendrait ben gros qu’elle torche Albert Einstein à Cranium ! Mais bon… je tiens ça mort et je ne dis rien à la femme en question. Ce serait comme essayer de freiner un tsunami avec un séchoir à cheveux. Ça marchera pas.
Ce n’est pas tout
Depuis le début de la controverse, je me tiens à l’écart de la mêlée sur les médias sociaux et je me dis que ça ne sert à rien d’alimenter ça.
Jusqu’à ce que je tombe là-dessus…
C’est vraiment beau. Ça me rappelle un sonnet de Shakespeare. C’est pareil.
Ce qui est le fun avec la réflexion du monsieur, c’est qu’il l’a partagée sur Internet au lieu de garder ça pour lui, mettant par le fait même la planète entière en garde de son grand manque de civisme.
C’est une bonne chose qu’il ait écrit ça dans le fond. On a une personne de moins de qui se méfier. Idiot comme ça, les chances sont minces pour qu’il soit à la tête d’un grand complot terroriste !
C’est pas parce que t’aimes pas quelque chose que c’est d’la marde
T’as le droit de ne pas aimer Mike Ward.
En fait, t’as le droit d’aimer ou non tout ce que tu veux, pourvu que tu respectes les goûts des autres. J’vais te donner un exemple.
Moi, la musique de Stefie Shock, je ne l’aime pas. Genre crissement pas. Si je croise Stefie Shock dans la rue, je change de trottoir de peur qu’il se mette à chanter. Quand je suis au restaurant et que j’entends Un homme à la mer pour chaque fille amère, j’ai juste le goût de me défoncer les tympans avec un pic à facture. Ça veut pas dire que le gars n’est pas bon !
Je ne vais pas sur Facebook pour écrire à monsieur Shock « VA DONC TE PENDRE » quand il passe une de ses chansons à la radio ! Je change de poste, c’est tout. Je reste pas là à faire prendre des proportions inimaginables à mon mécontentement.
Tout ça pour dire que c’est correct si t’aimes pas Mike Ward, mais ne perds pas ton temps à lui écrire un message dans lequel tu l’invites à se tuer. Écris des mots doux aux personnes que tu aimes à la place !
J’ai l’impression que les gens consacrent plus d’énergie à ce qu’ils n’aiment pas qu’à ce qu’ils aiment. C’est spécial ça.
J’ai pas le temps pour ça moi. Ma vie serait ben trop pénible s’il fallait que je démontre de l’animosité à tout ce que je n’aime pas sur la Terre !
Je me réveillerais le matin en sacrant après mes couvertes : « Si vous étiez pas là y ferait moins frette en dehors des couvertes » !
J’irais sur la page Facebook du tofu pour écrire : « TU GOÛTES RIEN » !
Après ça je rentrerais dans un concessionnaire Ford : « J’ai vu votre panneau sur le bord de l’autoroute… J’EN VEUX PAS D’CRISS DE F-350 » !
J’appellerais les artistes que j’aime pas un à un : « Est-ce que je pourrais parler à Bono s’il vous plaît ? Oui… c’est ça là… je voulais juste vous dire que C’EST À CHIER DU U2 » !