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Le retour : les dangers de la mégalomanie

Après avoir connu une carrière prolifique à l'international, Cristóbal, un artiste d’art contemporain, retourne chez lui, sur une petite ile volcanique. À son arrivée, il est surpris de voir que son ile est menacée par le tourisme de masse. S’il ne fait rien, d’ici quelques années, son ile aura perdu son identité. Elle ne sera plus qu’une pâle copie des milliers d'autres stations balnéaires qui peuplent déjà notre planète.

Pour stopper les promoteurs peu scrupuleux, Cristóbal a un plan : transformer ce coin perdu au milieu de l’océan en œuvre d’art vivante.

Puis, un jour, le populaire artiste perd la vie dans un étrange accident de voiture. L’enquête revient à l’inspecteur Ramirez. Il découvrira qu’avec son ambitieux projet, Cristóbal ne s’était pas fait que des amis. Beaucoup de gens auraient souhaité qu’il disparaisse…

Pour concevoir cette bande dessinée, Bruno Duhamel s’est inspiré très librement de la vie de César Manrique, un peintre et un sculpteur espagnol qui a transformé dans les années 60 et 70 son ile natale de Lanzarote dans les iles Canaries en véritable œuvre d’art. En 1993, soit un an après la mort de Manrique, Lanzarote a été reconnue comme réserve de biosphère par l'UNESCO.

Même si en préface le bédéiste nous assure que « toute ressemblance avec des personnes existantes ou ayant existé est une pure contrefaçon », il est impossible de ne pas faire de rapprochements entre la fiction et le réel.  

Comme Manrique, Cristóbal ne permet pas la construction de maisons de plus de deux étages sur l’ile et interdit les panneaux publicitaires. Cependant, le plus étrange, c’est que Manrique a lui aussi été retrouvé mort dans un accident de la route.

Je ne sais pas si Manrique était atteint de mégalomanie, mais c’est l’un des thèmes les plus forts de Le retour. En effet, en adoptant une narration classique (on suit l’enquête du policier, laquelle est entrecoupée de retours en arrière), Bruno Duhamel expose très bien les dangers du pouvoir sur les êtres humains.

Plus précisément, le roman graphique montre comment un homme peut changer et devenir tout ce qu’il a toujours combattu. Parce qu’à un certain moment, Cristóbal croit être le maitre tout puissant de son ile. Au nom supposément de l’art, il s’isole et repousse tous ses proches. Il n’en a rien à faire des dommages collatéraux.

Visuellement, le bédéiste joue avec les contrastes pour délimiter le temps. Si les retours en arrière sont très lumineux et colorés, le reste du récit adopte une mise en scène plus sobre avec des couleurs presque sépia.

Dans les deux cas toutefois, son trait est très expressif et libre. Son coup de crayon parait être aussi fougueux qu’un cheval sauvage. Bref, le résultat est remarquable.

Verdict

À mi-chemin entre le polar et la descente aux enfers, Le retour est une bande dessinée qui étonne surtout par son style graphique rafraichissant. 

Le retour

Bruno Duhamel

Grand Angle

96 pages

Cote : 3,5 étoiles sur 5

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